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Perfomers de Kinshasa
Kris Pannecoucke

Les "performers de Kinshasa", les artistes de la survie qui dénoncent et provoquent le pouvoir en place à travers l'art. Les thèmes sociaux tels que l'environnement, les soins de santé, la violence, l'identité africaine et la lutte pour la survie sont au cœur du projet. Les œuvres des performeurs émergent de la rue et se nourrissent du chaos. Pour une grande partie de la population de Kinshasa, où l'on trouve les inégalités les plus criantes de la planète, vivre est une question de survie plutôt que de vie.
Les artistes ont trouvé le meilleur moyen d'exprimer la colère de la population, leurs frustrations personnelles et de défier les autorités à travers leur expression créative.

Le nombre d'habitants de la capitale Kinshasa n'est pas connu, mais on l'estime entre 15 et 18 millions. Avec environ 7 000 à 9 000 tonnes de déchets produits chaque jour, dont 1 500 tonnes de plastique, Kinshasa est un grand pollueur. Plus de 15 millions d'habitants qui consomment et jettent négligemment au moins une bouteille par jour représentent une énorme pollution dans la mégapole africaine. 
La pollution plastique est également l'une des principales raisons pour lesquelles des quartiers entiers de la ville sont de plus en plus souvent inondés après une pluie. L'eau ne peut plus s'écouler par les cours d'eau et les égouts obstrués qui aboutissent normalement au fleuve Congo. 

Ce qui est un déchet pour les habitants est du matériau pour certains artistes qui le recyclent en œuvres d'art.
Il en résulte des costumes impressionnants. Shaka Fumu Kabaka utilise des poupées cassées ou des tubes de dentifrice, Sarah Ndele travaille avec des pots en plastique, Etabe recycle des boîtes de sardines ou des emballages de cigarettes et Falonne Mambu utilise des fils électriques pour créer de véritables sculptures. Ils trouvent leur inspiration dans leur passé, comme la guerre ou ce qu'ils ont enduré dans une métropole chaotique où l'insécurité augmente à mesure que la nuit tombe.

 

Shaka, 35 ans, fait partie d’un groupe restreint mais croissant d’artistes multidisciplinaires de Kinshasa, la capitale du pays, qui créent des costumes élaborés à partir d’ordures ménagères trouvées dans les décharges ou dans les rues. "Matshozi 6 Jours" (Six jours de larmes) est un costume surréaliste qu'il a confectionné à partir de poupées récupérées pour honorer les victimes de la guerre des Six jours. Enfant, Shaka Fumu Kabaka a été témoin des atrocités commises pendant la guerre de six jours entre les forces ougandaises et rwandaises dans sa ville natale de Kisangani en juin 2000. "Ce n'était même pas notre guerre, mais une guerre entre deux armées étrangères", a déclaré Shaka. Les combats ont fait plus de 1 000 morts et de nombreux blessés dans cette ville du nord de la République démocratique du Congo. « J'ai perdu des proches », raconte Kabaka. « Chaque fois que je vois une poupée cassée traîner quelque part dans la rue, cela me rappelle ce qui s'est passé à Kisangani. Les poupées symbolisent les victimes que j'ai vues de mes propres yeux », explique Kabaka. Il a fallu un an pour rassembler toutes les poupées. « La première fois que j’ai porté le costume, c’était un lourd fardeau. Non pas à cause du poids, mais à cause du nombre de victimes que cela représente. »


Différents collectifs regroupent ces artistes de rue, parmi lesquels Mbokaarts et Farata sont les plus importants.

 

Le photographe et cinéaste Kris Pannecoucke, qui a fait le portrait des artistes, est né à Kinshasa et a principalement travaillé au Congo ces dix dernières années.

Le photographe aime travailler depuis longtemps au Congo, où il souhaitait mettre des accents différents de ceux des photographes de reportage. J'ai toujours eu un grand respect pour l'ingéniosité des Congolais, la créativité. Créer quelque chose avec peu. Le travail sur les costumes fabriqués à partir de matériaux recyclés en est un bon exemple. 

Maintenant, je cherche d'autres horizons, j'ai envie de découvrir d'autres régions du monde, même si je ne dois pas aller loin. 

Aujourd'hui, la photographie doit parfois laisser la place à la réalisation de films documentaires, là aussi j'aime rechercher des sujets avec une perspective surprenante qui démystifie les préjugés.

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